Interview

Ulrich Sander : Le combat de Helmuth Hübener pour la vérité et la justice

Une interview d’Ulrich Sander, auteur, qui nous parle de la trame de fond de son livre sur Helmuth Hübener.

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Helmuth Hübener a été la plus jeune victime du Tribunal du peuple Il a été condamné à la peine de mort pour avoir résisté au régime nazi et a été exécuté le 27 octobre 1942 à l’âge de 17 ans. Cette année marque donc le 80e anniversaire de la mort de ce membre fidèle de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours.

Dans la région germanophone personne n’a publié autant d’ouvrages sur l’histoire de Helmuth Hübener que le journaliste Ulrich Sander. Les rédacteurs du site Internet de l’Église l’ont interviewé.

Monsieur Sander, quand avez-vous eu connaissance de l’histoire de Helmuth Hübener pour la première fois ?

Au cours de ma scolarité, j’ai eu un professeur qui avait un ami journaliste. Ce journaliste s’était penché sur les décisions du Tribunal du peuple et d’autres tribunaux nazis. Il avait publié les résultats de ses recherches dans des livrets mineurs. C’est là que j’ai découvert l’histoire de Helmuth Hübener pour la première fois, et j’ai eu envie d’en savoir plus sur sa vie. J’avais 17 ou 18 ans, soit l’âge de Helmuth Hübener lorsqu’il est mort.

Qu’avez-vous fait alors ?

Je suis d’abord allé à Hambourg, en Allemagne, pour rencontrer des personnes qui avaient connu Helmuth Hübener personnellement. J’ai d’abord pris contact avec un professeur de collège qui l’avait eu comme élève et qui était le dirigeant de la paroisse locale de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours à ce moment-là. J’ai également abordé certains de ses amis et de ses proches, notamment un demi-frère. Karl-Heinz Schnibbe et Rudolf Wobbe, qui avaient soutenu Helmuth Hübener dans ses activités de résistance, avaient déjà émigré en Utah.

Qu’est-il arrivé ensuite ?

Le dirigeant de la paroisse m’a présenté à Frau Sommerfeld, une amie très maternelle de Helmuth Hübener. Il lui avait envoyée une lettre d’adieu juste avant son exécution. Les paroles de cette lettre l’avaient profondément touchée, elle les connaissait par cœur. Avec le temps, j’ai perdu contact avec la paroisse car beaucoup de ceux qui se souvenaient encore de Helmuth Hübener avaient émigré en Utah. Là, on n’a pas parlé de son histoire pendant longtemps.

Ici en Allemagne, chaque mois de janvier j’ai écrit pendant un certain temps des petits articles commémoratifs à l’occasion de l’anniversaire d’Helmuth Hübener. Un de ces articles a été publié au milieu des années soixante dans un bulletin officiel du syndicat des Postes, et repris par Günter Grass dans son roman « Örtlich betäub » [Anesthésie locale]. C’est par ce biais que le professeur Alan Keele, un germaniste de l’université Brigham Young, a pris connaissance de cette histoire. Il a retrouvé quelques-uns des collègues de résistance de Helmuth Hübener ainsi que d’autres témoins du passé vivant en Utah, les a interviewés et a publié ces interviews. Par conséquent ce n’est qu’à la fin des années soixante que les membres de l’Église de Hübener ont redécouvert leur frère dans la foi et son destin.

Quels effets cela a-t-il eu ?

L’histoire de Hübener n’a pas seulement été connue et reconnue à Salt Lake City, mais à travers tous les États-Unis. Les manuels scolaires américains l’ont mentionnée bien plus tôt que les nôtres ici en Allemagne. Le processus a été plus long ici et j’ai eu la possibilité d’y prendre part. À mon avis, Helmuth Hübener est mieux connu aux États-Unis qu’ici. En ce qui concerne la résistance de la jeunesse contre le nazisme, les chaînes de télévision d’ici se concentrent sur la Rose Blanche et les Pirates de l’Edelweiss.

J’ai contribué également au choix du nom d’une école : la Stadtteilschule Helmuth Hübener à Hambourg. Je suis toujours en contact avec cette école de quartier. J’apprécie particulièrement le logo utilisé à maintes reprises par l’école dans ses publications, car il intègre le nom de Helmuth Hübener sous forme de jeu de mot, « Mut üben »[ Faire preuve de courage] : Stadtteilschule HelMUTh HÜBENer. En 2020 l’école du centre de détention de Berlin a aussi été renommée Helmut Hübener Schule.

Pourquoi Helmut Hübener est-il si souvent laissé de côté ?

Les rapports à son sujet se contentent souvent de dire qu’il écoutait les programmes radio de la BBC et qu’il faisait connaître les nouvelles qu’il y entendait. Je trouve que c’est faux ou tout au moins insuffisant. Oui, Helmut Hübener notait en sténo le contenu de programmes radio et il les diffusait autour de lui. Mais il a aussi écrit des messages et des poèmes de sa propre création, et il parlait de la vie des jeunes de Hambourg de son époque. N’importe quelle personne qui a lu ses tracts le sait. Ces publications n’étaient pas importantes en quantité. Il y a eu peut-être un millier d’exemplaires de son œuvre complète, constituée d’environ 60 ouvrages, tapés à la machine sur papier carbone.

De mon point de vue les capacités intellectuelles de Hübener, son engagement et son courage en particulier ne sont pas suffisamment reconnus. Pour Helmuth Hübener et ses amis, c’était évident : On ne peut pas se battre pour la vérité et la justice tout en laissant les autorités faire ce qu’elles veulent.

Nous vous remercions pour cette interview, Monsieur Sander.

Cette année, le documentaire« Vier gegen Hitler – auf den Spuren der Helmuth-Hübener-Gruppe »[Quatre contre Hitler : Sur les traces du groupe d’Helmuth Hübener], a été publié. Ulrich Sander a participé à sa réalisation.

Le tome 3 de la série « Les Saints » reprend son histoire. Un court essai sur la page de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours parle également de lui. Helmuth Hübener ainsi que deux de ses compagnons résistants étaient membres de cette Église.

Remarque concernant le nom de l’Église:Quand vous parlez de l’Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours, veuillez utiliser le nom complet de l’Église la première fois que vous la mentionnez. Pour avoir plus de renseignements sur l’utilisation du nom de l’Église, consultez notre Guide de rédaction.